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Terminer en beauté, éviter d’y penser !

La destination n’a pas changé depuis le 10 novembre dernier (toujours les Sables d’Olonne !), mais le compte à rebours a commencé pour TeamWork -Team Snef, de nouveau dans l’Atlantique Nord depuis le mardi 14 janvier. Dans ce jardin balisé par les archipels familiers du Cap Vert, des Canaries, ou des Açores, Justine Mettraux met tout son talent dans la bagarre qui continue de faire rage entre la quatrième et la dixième place, histoire de finir en beauté son premier Vendée Globe, entre le 23 et le 25 janvier selon toute vraisemblance.

Dix pour cent ! C’est à peine la portion des 24 000 milles du tour du monde qui restent à TeamWork -Team Snef pour pointer son étrave dans le chenal des Sables d’Olonne où le public ne manquera pas de saluer la performance de Justine Mettraux. La première femme de la course ?  Certes, mais pour celle qui réclame d’être d’abord reconnue pour ses qualités de marin, la mention ne vaut pas éloge. Terminer dans le top ten à la barre du seul bateau datant de 2018, souffler jusqu’au bout dans le cou des plus capés des solitaires, embarqués sur des IMOCA de dernière génération,… voilà notre sujet. Le premier tour du monde en solitaire de Justine force le respect, nombreux sont les observateurs avisés, de Loïck Peyron à Vincent Riou en passant par Michel Desjoyeaux, à l’avoir déjà pointé. Mais quand on l’évoque au téléphone avec la navigatrice, elle ne tarde pas à mettre le holà : « J’essaie de ne pas penser au score final. Il reste encore pas mal de route mine de rien, du vent fort s’annonce au Nord des Canaries et il faudra ensuite retrouver les réflexes de veille du trafic maritime à l’approche du continent. Donc chaque chose en son temps ! …».

« … chacune à son tour et l’une après l’autre ! »

Justine martèle à chaque vague cette recette qui lui a jusqu’ici parfaitement réussi. D’abord, en finir avec l’alizé de Nord-Est. Une fois stabilisé, il va permettre à Juju « de se reposer un peu avant d’attaquer la dorsale » qui l’attend ces prochains jours.

Car les dernières semaines n’ont pas été de tout repos : « Entre le Cap Horn et l’équateur, raconte la navigatrice, j’ai vraiment eu l’impression de manger mon pain noir. Ça a commencé au près après les Malouines. J’ai raté de peu le train, je me suis retrouvé dans l’Ouest, du mauvais côté de la dépression avec beaucoup de manoeuvres et il a fallu ensuite traverser ce front stationnaire au Cap Frio. C’était éreintant. Jusqu’au Horn j’ai toujours pris du plaisir, même dans les moments délicats, mais là franchement, c’était ingrat. Ça m’a calmée pour un moment ! … »

Le répit fut de courte durée puisqu’au sortir de ce front poisseux au nord de Recife, les alizés de l’hémisphère Sud n’ont finalement duré que 24 heures. « C’était un mal pour un bien, on a eu de la chance avec le Pot au Noir quasi absent. C’est très judéo-chrétien la course au large finalement ! » philosophe Justine.

Et la navigatrice de se féliciter d’avoir été bénie des dieux, en traversant tout cet épisode sans casse majeure. « Je n’ai pas eu trop de gros orages comme certains. Quand je vois la concurrence, j’ai presqu’eu l’impression de passer entre les gouttes… »

En creux, Justine vise Thomas Ruyant qui a perdu son J2 (la voile d’avant à tout faire) dans un grain terrible. Depuis, les avaries de gréement se sont multipliées, touchant de nombreux concurrents directs, ce qui fait plutôt l’affaire de Juju au classement où elle pointe huitième ce matin, mais l’incite aussi à la prudence. « Jean (Le Cam) est encore la preuve avec son avarie d’avant-hier que personne n’est à l’abri. Du coup, j’ai installé un câble en sécurité au cas où. C’est quand même très particulier ce tour du monde où on vit en permanence avec cette épée de Damoclès au dessus de la tête. J’ai fait attention de calmer le jeu quand c’était dur au près, mais je crois que c’est plus psychologique qu’autre chose. Une avarie de câble ou de cadène, personne n’y peut rien… »

Tous Charlie !

Dans cette remontée de l’Atlantique Sud, la flotte a donc laissé des plumes et vu s’envoler les leaders qui ont creusé une avance considérable avec à la clef la victoire sans appel de Charlie Dalin. Un triomphe salué par Justine qui note : « Je pense que tout le monde est content pour Charlie tellement il était passé près il y a quatre ans. Son niveau de maîtrise avec Yoann comme aiguillon qui fait une super course aussi, a été impressionnant. Je suis heureuse également pour Sébastien Simon qui finit troisième sur notre ancien bateau de The Ocean Race. Un IMOCA bien né ! »

Après ce podium consacré, viendront donc les places d’honneur. Si les quatrièmes et cinquièmes rangs du classement semblent acquis au tandem Jérémie Beyou - Sam Goodchild, tout reste encore possible jusqu’à la dixième place. Chacun avance avec ses forces et faiblesses. Justine n’a plus de J0 depuis le cap de Bonne Espérance. Cette voile légère manquera à la navigatrice dans la traversée de la dorsale ce week-end, même si elle relativise : « Ce n’est pas une situation de blocage. La dorsale descend vers le Sud et va nous passer dessus. » Il sera temps ensuite de doser sa trajectoire vers le Nord-Est pour rentrer dans l’hiver pas trop brutalement et arriver dans des conditions maniables en Vendée.

Verdict final aux Sables d’Olonne entre le 23 et le 25 janvier